Jorge Mayet

En tant qu'exilé cubain vivant à Majorque, la mémoire photographique de Jorge Mayet lui a permis de concevoir des paysages et des formes naturelles étonnamment réalistes basés sur des visions de son lointain pays d'origine. Les arbres réalistes représentent les sentiments de nostalgie et de désir de l'artiste pour sa patrie géographique et spirituelle. Nourri de souvenirs et d'expériences, son travail cherche à conserver l'essence du paysage cubain sous ses formes romantiques et mystiques. Dans le langage allégorique de Mayet, nature et artifice se conjuguent dans une atmosphère énigmatique, ses sculptures éphémères étant issues d'un sens unique des cultures folkloriques de civilisation. Contraint par les ravissements sociopolitiques qui perturbent les relations entre les populations et leurs environnements habituels, l'artiste crée des formes d'arbres sans racines qui ne semblent jamais toucher le sol comme en constante transition.

La pratique de Mayet s'articule autour d'installations sculpturales à petite échelle et de répliques miniaturisées d'arbres, de plantes et d'autres objets naturels imaginaires. La vision de l'artiste des arbres est telle que leurs racines restent intactes (De Mis Vivos Y Mis, 2008), de même que la touffe de terre résiduelle dans laquelle ils sont plantés (Cuando Más Pienso En Ti, 2008). Fabriqués avec du fil électrique, du papier, de la peinture acrylique et du tissu, qui sont combinés pour créer des qualités réalistes, les objets affichent un réalisme en trois dimensions. Si les fils et le papier mâché évoquent la culture artisanale, ils sont en fait enracinés dans l'intérêt de l'artiste pour la langue ancienne de l'histoire précolombienne. Mayet soutient qu'il y a de la vie dans les arbres qui donne vie aux gens, et que la force et la résilience symbolique des plantes vivaces peuvent informer la valeur universelle de l'humanité.

Les sculptures de Mayet confessent une orientation existentielle vers la création d'autres mondes. Ils se réfèrent à une intégrité qui a été en quelque sorte perdue, en raison de ce que l'artiste perçoit comme la décadence de l'histoire dans la société ruineuse d'aujourd'hui. Mayet prend l'arbre comme une icône symbolique capable de résister à ces conditions désastreuses, créant des objets qui existent à leur image. Les arbres de Cuba étant associés à un mysticisme symbolique, qui vient des liens avec la religion yorubique apportés par les esclaves africains. Les sculptures de Mayet font référence au rituel dans lequel les gens priaient devant les arbres, enterrant diverses offrandes dans et autour de leurs racines. Les sacrifices d'animaux, qui faisaient partie du rituel ancestral, sont évidents dans l'application par Mayet des plumes d'oiseaux utilisées par l'artiste pour former un dialogue entre les arbres aux racines profondes de leur symbolisme historique et religieux.

© Osei Bonsu, 2014