

Tout comme nos constructions se sont immiscées dans le paysage, peut-être qu’un jour, la nature finira par s’insinuer dans nos lieux, en prenant vie sur nos murs.
Biographie
Béatrice Baulard est une plasticienne textile dont le médium préféré est le fil. Depuis une dizaine d'années, elle emploie des techniques ancestrales autour du fil et crée des volumes tissés, tricotés, crochetés et, plus récemment, tuftés.
Sa famille lui a donné l'exemple de ce que l'on fabrique soi-même avec peu : jardiniers, mécaniciens, couturières, tricoteuses, brodeuses, cuisinières, voire peintres, bricoleurs, soudeurs, vignerons, forgerons… Elle s'en inspire avec humilité et tente de répondre à plusieurs questions :
– La répartition des tâches domestiques dans les familles traditionnelles. Dans certaines de ses pièces, elle insère, sertit un élément trouvé : caillou, verre poli, même plastique, pourvu qu'il ressemble à un minéral. Le contraste de texture avec les fils, les laines, matières souples par excellence, symbolise ce partage : aux femmes les matières molles, la cuisine, la couture, le tricot, aux hommes les matières dures, l'acier, le bois, la terre.
– La place de la beauté dans l'art contemporain. Depuis une vingtaine d'années, le discours a pris une énorme importance, presque plus que la création de l'œuvre. Alors que, dans son cheminement, elle s'attache à mettre l'accent sur l'esthétique, le geste ainsi que la sélection de matériaux modestes, avec la volonté de flouter la frontière entre arts plastiques et artisanat d'art. Elle vise à susciter l'émerveillement, à se libérer des étiquettes, à intégrer le beau dans l'environnement.
– La visibilité des femmes artistes et encore plus des femmes artistes « âgées ». Abordant avec sérénité la soixantaine, elle dit volontiers que la vie commence à 50 ans et s'emploie depuis dix ans à le prouver. N'ayant comme bagages qu'une intense curiosité et une longue initiation du regard. Elle s'autorise à utiliser des savoir-faire qu'on estimait de base aux siècles derniers, à les extraire d'une image surannée et à mettre en forme des sensations diffuses, des émotions, et réinterprète des souvenirs visuels.
Son travail s'articule entre ouvrages méticuleux, minuscules, et des grands formats tuftés. Toujours, elle fabrique avec une volonté d'exploiter des restes, des petites quantités, des stocks dormants d'anciennes usines, veillant à son impact sur la nature et sur la société. Faire avec ce qu'il y a, détourner, valoriser, faire des propositions avec peu, travailler avec une économie de moyens.
Elle reprend à son compte la phrase de David Bowie : « Vieillir, c'est se transformer en la personne qu'on a toujours voulu être. »
Ce lent travail exploratoire met à nu des émotions, des réactions épidermiques à des situations et l'encourage à bouleverser sa façon de penser. De personne imperceptible, elle puise aujourd'hui dans la lumière, avec pour objectif de devenir une femme heureuse, aimante et aimée, créatrice et créative.