Du 31 mai au 25 juin 2025 aura lieu lexposition Cher Ami, oiseaufantastique C/o association Fée Mazine, Pierrefond, Île de la Réunion
Cher Ami est un oiseau, pas comme les autres : rescapée de la ville, elle a été nourrie à la main depuis sa naissance. Elle a appris a interagir méthodiquement avec l’humain, afin d’obtenir tout ce qu’elle désire. Cher Ami, on ne peut l’ignorer : elle va sauter sur la tête des enfants, courtiser tout ce qui bouge, dominer ses humains. Et on ne peut que lui obéir. Nourrie, logée et aimée, Cher Ami aura une espérance de vie d’une trentaine d’année, à différence des six ans qu’elle aurait pu vivre en ville. Cher Ami vit en liberté totale avec son humaine. Satisfaite de cette vie, elle ne s’intéresse guère à la communauté de pigeons du quartier, ni à l’accouplement avec son espèce. L’idée de composer avec un pigeon biset des villes à origine depuis une réflexion sur le texte de Vivre avec le trouble de Donna Haraway, philosophe des sciences et professeur du département d’histoire de la conscience. Haraway nous livre son point de vue au sujet de la relation entre l’humain et le pigeon, qu’elle qualifie de jeux de ficelles et nous engage dans ses intrigues de SF (science-fiction ou féminisme spéculatif, selon le cas). Les aptitudes des pigeons surprennent et impressionnent le êtres humains, lesquels oublient souvent comment d’autres êtres vivants ou d’autres choses les rendent capables eux-mêmes. Ces autres peuvent se trouver à l’intérieur ou à l’extérieur des corps (humains et non humains), à différentes échelles de l’espace et du temps. Ils façonnent en tout cas les respons(h)abilités. Pour cette série j’essaye de rassembler tout ce que Cher Ami incarne de fantastique, héroique, antihéroique, de magique, à partir de son regard silencieux depuis où il y a tout l’univers consensé.
Cher Ami est le pigeon voyageur qui a sauvé la vie à 194 soldats français pendant la première guerre mondiale. Empreunté par des pigeonniers du Royaume-Uni pour son usage en France, à son retour, Cher Ami est décoré de feuilles de chêne et devient la mascotte du département. Il est par ailleurs décoré de la Croix de guerre avec palme pour son action héroïque dans la délivrance de messages dans le secteur du Verdun. Il meurt à Fort Monmouth (en), dans le New Jersey, le 13 juin 1919 des suites des blessures reçues lors de sa dernière bataille et entre au Racing Pigeon Hall of Fame en 1931. Il reçoit également la médaille d’or de la part de la Organized Bodies of American Racing Pigeon Fanciers, en reconnaissance de ses prouesses lors de la guerre. Le corps empaillé de Cher Ami fait partie de la collection du Smithsonian Institution. En mars 2022, la guerre en Ukraine est annoncée par les médias. C’est à partir e cette période qu’a commencé mon intérêt pour l’histoire de Cher Ami. Objets vidéographiques, textes poétiques, danses symbiotiques, lianages de vacoa, créations de nids, installations d’oeufs, expositions de plumes ont permis cette transposition fantastique de Cher Ami.
Nous devons créer de nouvelles parentés, des lignées de connexions inventives. Nous devons apprendre ainsi, au coeur d’un présent épais, à bien vivre et à mourir, ensemble. Il nous faut semer le trouble, susciter une réponse puissante à des événements dévastateurs. Nous devons aussi calmer la tempête et reconstruire des lieux paisibles. Donna Haraway Le pigeon domestique est le pigeon citadin que l’on retrouve dans nos villes. Il s’agit de la forme domestique du pigeon biset, qui subsiste également comme oiseau sauvage dans son milieu naturel original : les falaises et autres milieux rocheux. Voilà dix mille ans que les pigeons bisets entretiennent des relations de co-domestication avec les êtres humains. Certaines tablettes cunéiformes mésopotamiennes, vieilles de cinq mille ans, attestent de tels rapports. C’est le plus ancien animal domestique du monde. Si le pigeon suscite aujourd’hui des sentiments mêlant dégoût, affection ou encore ras-le-bol, il a pourtant connu un tout autre passé. Sous le nom de colombe, il est représenté dans l’Ancien et le nouveau Testament, ainsi que dans le Coran, comme un animal bienfaisant. De symbole de paix, le pigeon se charge au fil des années d’une symbolique négative, associé en ville à la saleté et aux nuisances sonores (roucoulements, claquements d’ailes, déplacements sur les planchers en bois, fiantes). Pour information la colombe ne correspond à aucune classification scientifique : elle n’est pas une espèce et la plupart du temps, désigne un pigeon biset ou une tourterelle blancs. Ce genre de bestioles ont une longue histoire en devenir avec les humains. Elles lient les gens qui s’occupent d’elles aux noeuds que forment les classes, les genres, les races, les peuples, les colonies, les postcolonies . Donna Haraway Aujourd’hui encore, en cas de guerre, les colombophiles sont contraints d’envoyer leurs volatiles à l’armée. Pourtant le pigeon a été abandonné au XX siècle, sans son consentement, avec l’avent des nouvelles technologies et malgré les progrès de la science, on explique toujours pas cette capacité unique qu’a cette espèce, de retrouver son nid, après avoir été relâché à des grandes distances. « Il y a une force extrêmement puissante pour laquelle jusqu’à présent, la science n’a pas trouvé une explication officielle. C’est une force qui comprend et régit toutes les autres et est derrière tout phénomène qui opère dans l’univers et qui n’a pas encore été identifiée pas nos soins. Cette force universelle est l’Amour » Albert Einstein Cette loyauté, qui fait que cette espèce serait prête à donner sa vie afin de retrouver son nid, sa descendance, son partenaire, a été exploitée depuis sa domestication (lachées au mariages, sport « romantique » colombophiles, opérations militaires, messages). Une fois perdus, la plupart des oiseaux meurent dans des conditions de misère. Et puis il y a ceux qui arrivent a s’adapter à leur nouvelle vie de sans demeure fixe. Ceux-ci se disent férals ou féraux et la féralité est une forme de décolonisation de la nature.
Le corps dans le processus de création. Découpé, démembré, mutilé puis, recomposé de façon parfois désarticulée, le corps est fragmentation, extériorisation, expression d’un chaos qui s’oppose et contraste avec le paysage tracé. Le choix voulu est celui de laisser au visiteur ou public, le loisir d’interpreter, librement cette composition. L’enjeu du processus de création est le mouvement, un mouvement interne qui se déploie dans l’espace, une phénoménologie de la perception, au service des pratiques somatiques et de la corporeité et de l’écologie corporelle. Le mot soma signifie d’ailleurs corps vivant et présent et les pratiques somatiques s’appuient effectivement, sur l’apprentissage incorporé et l’interaction synergique entre nos fonctions biologiques, le mouvement dans l’environnement, la conscience et l’apprentissage organique. Cette recherche en solo, avec d’autres danseur.se.s ou avec le pigeon Cher Ami, a été menée à l’AJCM, association des jeunes de Château Morange, à l’occasion de la mise à disposition de la salle de danse à l’AJCM. Des ateliers autour de la corporéïté et des états de corps, au cours desquels, à eu lieu la création, ont été menées de septembre 2024, jusqu’au passage Garance, qui a provoqué la fermeture provisoire de la salle. Filmée, photographiée, documentée en noir et blanc, en écho à la photo d’histoire et de patrimoine cette recherche a effectivement vu, du point de vue de la technique visuelle, une première étape à l’iconothèque - IHOI en 2022, dans le cadre de la résidence « Patrimoines Iconographiques ». Les impression de photos, découpées et collées, sont effectuées sur papier satiné, et le dessin est réalisé à l’encre acrylique avec une plume de verre, sur papier Canson. Le choix du format polaroid, format paysage de 30X75 cm est fait en raison afin de prolonger, ralentir le voyage visuel. Depuis mes premiers formats polaroid en 2014 j’ai continué a travailler sur ce tracé, ce 8, symbole mathématique de l’infini, en le laissant de transformer. La mise en scène qui articule ma pratique avec le théâtre, me permet d’imaginer dans un futur proche, une performance immersive, voir interactive avec les publics, nourrie par ces planches.
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