Une rencontre avec Marie-Odile : collectionneuse d’art franco-brésilienne

La série Bianca Bondi Bloom, 2018, dans « Diet & Psychology » (exposition personnelle), Les Limbes, Saint-Étienne © Marie-Odile Falais.

Aujourd'hui, Artsper est parti à la rencontre de la collectionneuse d'art Marie-Odile, plus connue sous son nom Instagram : @imagine-moi. Elle nous a parlé de ses passions, et notamment son amour pour les NFT, son avis sur les artistes femmes au sein du marché de l'art… et bien d'autres choses encore. Découvrez sans attendre notre interview avec cette personnalité unique du monde de l'art !

1. Bonjour Marie-Odile ! Peux-tu te présenter et nous expliquer le principe de ton compte Instagram ?

Je suis Marie-Odile, je suis franco-brésilienne et j'ai suivi une formation en Histoire de l'Art à La Sorbonne Paris I, un cycle Licence puis Master en recherche. J'ai été très heureuse de centrer mes deux années en Master recherche sur le Brésil afin de me plonger de manière académique dans l'une de mes propres cultures, moi qui ai toujours été à l'école en France. Suite à mon expérience professionnelle dans le milieu de l'art, notamment en galerie, je travaille aujourd'hui en freelance en stratégie et création de contenu pour les réseaux sociaux.

Sur mon compte Instagram, je partage mes visites d'expositions, de musées, les événements culturels auxquels je me rends, mais aussi mes réflexions pour inciter à faire de même - que l'on soit néophyte ou amateur d'art et de son histoire. J'aime partager des clés de lecture, et donner envie de s'y intéresser. Je propose un contenu bilingue, car selon moi, ma génération consomme beaucoup de productions culturelles diverses en VO sous-titrée, mais on en propose assez peu. J'aime penser que peut-être des personnes à l'autre bout de monde peuvent aussi s'intéresser à ce contenu !

2. Tu as coécrit un catalogue au sujet d'artistes femmes à suivre dans l'espace NFT. Pourrais-tu nous en dire plus ?

En effet, c'est un catalogue gratuit qui regroupe des statistiques et des textes sur la parité dans le Web3, un historique, des textes pour apprendre ce que sont les NFTs, un guide sur comment en acheter, des conseils de collectionneuses et 5 curations d'artistes proposées par Annelise Stern, Jessy Jeanne, Joséphine Louise, Léa Duhem et moi-même. Il est gratuit, non-exhaustif et ce projet sera amené à être réitéré afin de proposer des curations différentes. Il est disponible sur https://www.gxrlsrevolution.xyz. C'est un début pour mettre en valeur le travail d'artistes selon des prismes différents.

3. Quels sont tes artistes contemporains préférés et pourquoi ?

Je n'ai pas 2 ou 3 artistes contemporains préférés en particulier en tout temps à tout épreuve, mais en ce moment, je suis particulièrement attentive et fan du travail de :

Bianca Bondi : j'adore sa méthode, c'est un univers artistique qu'elle a créé et qu'elle peut décliner presque à l'infini. Je trouve son travail extrêmement abouti dans la démarche, son intérêt pour l'écologie et l'ésotérique prend forme à différentes échelles, notamment dans l'altération des objets par la chimie. La forme donne voix au fond et inversement.

Sara Sadik : J'admire son exploration sans condescendance et avec poésie de ce qu'elle nomme le « beurcore », les masculinités, les formes et supports de communication de nos générations et des plus jeunes. D'autant plus que son art s'exporte et participe à une représentation internationale de la scène artistique française.

Zanele Muholi : J'ai vu son travail pour la première fois en 2018 à Paris Photo Fair. Sa photographie puissante avec des contrastes tranchants m'a bousculé et j'ai une profonde admiration pour son travail d'artivisme.

Si je devais nommer une superstar, je dirais Jean-Michel Basquiat pour tout ce qu'il exprime à travers son art, de la manière dont il était perçu ou considéré et pour le mélange de registres, de références, d'inscription, de peinture et de support.

Et si je devais ajouter une artiste NFT, je dirais Marissa Noana pour la façon dont elle s'inspire de la nature brésilienne lorsqu'il s'agit d'imaginer des tactiques de guérilla pour occuper l'espace et faire entendre sa voix

De gauche à droite : "Bulle Derouette" de la collection personnelle de Marie-Odile ; une image de Sara Sadik présentée à la Biennale de Lyon © Sara Sadik

4. Tu as récemment acheté une œuvre sur Artsper. Laquelle as-tu choisi et comment a-t-elle trouvé sa place dans ton appartement ?  

J'ai choisi l'œuvre Boogie down de Shepard Fairey (Obey). En plus d'être un street artiste américain depuis les années 80, il est à l'origine de la création du poster HOPE de Barack Obama. Malheureusement, l'œuvre n'a pas encore trouvé sa place, car je réfléchis encore à l'agencement de mon collection wall. C'est une manière de présenter les œuvres dans un nuage où les œuvres se répondent. Au grand dam de Sandro, mon cher et tendre, qui trouve que je mets trop de temps à déballer les acquisitions… sous couvert de « oui, mais je veux faire une vidéo unboxing ».

5. En tant qu'habituée des expositions, quelle a été l'exposition la plus marquante de 2022 pour toi ? 

L'exposition qui m'a le plus marquée en 2022 est « Habibi, les révolutions de l'amour à l'Institut du Monde Arabe ». Et je suis ravie qu'elle soit prolongée jusqu'au 19 mars ! Non seulement le propos de l'exposition est pertinent sans jamais sous-entendre que c'est une problématique propre au monde arabe, mais c'est également un sujet qui nous concerne tous ! De plus, les cartels traduits en arabe m'ont paru très cohérents, par rapport à la thématique et au lieu.

6. Tu es une grande fan de NFT. Pourrais-tu nous parler de cette passion ?  

Je me suis intéressée au Web3 au début de l'année 2021, avec les premiers articles sortis sur la vente d'un NFT de Nyan Cat, puis la vente historique par Christie's de Everyday : the first 5 000 days par l'artiste Beeple. J'ai voulu comprendre et Brian Beccafico, aujourd'hui spécialiste NFT chez Sotheby's, m'y a aidée. J'ai créé mon wallet et j'ai commencé à collectionner, chercher des artistes et me lier avec des artistes, d'autres curieuses et collectionneuses comme moi. Contrairement à ce que certains peuvent penser, la technologie NFT est un outil pour les artistes digitaux, mais les artistes qui créent grâce à l'ordinateur, les tablettes graphiques et l'IA existaient déjà avant la blockchain. Les NFTs me permettent de collectionner des œuvres digitales, des vidéos, des photos, des GIF. Il y en a pour tous les portefeuilles, il n'y a pas de barrière autre que celle de mettre en place son wallet et acheter quelques cryptos. Il existe des places de marché où vous pouvez acheter des cryptos avec la carte bancaire.

De gauche à droite : Marie-Odile à une exposition de Yayoi Kusama ; Badiucao à DOX Prague © Marie-Odile Falais 

7. Comment vois-tu l'évolution future du marché des NFT et de l'art digital en général ? Selon toi, les artistes femmes ont-elles une place assez importante dans l'art digital ?

Avec la blockchain, je peux choisir une marketplace selon la blockchain sur laquelle elle opère. L'information est accessible, lisible, je peux voir qui a acheté quoi à combien, je peux voir l'historique d'une œuvre. C'est un niveau de transparence rare, où l'information est accessible à tous. La spéculation n'est pas mon leitmotiv, mais je pense à acheter en double ou triple, car on ne sait pas ce qu'il en sera dans 5 ans et je n'ai pas envie de me séparer définitivement d'une œuvre que j'aime pour le profit. Selon moi, c'est également un bout d'histoire, et ça m'intéresse de le garder. Si dans 10 ans internet n'existe plus, j'aurais d'autres choses à penser que de me morfondre sur mes wallets !

Il faut savoir qu'avec Jessy Jeanne et Annelise, nous nous sommes rencontrées grâce à Instagram en 2020. L'année suivante, nous avons été chamboulées et curieuses d'apprendre ensemble ce qu'est le Web3, les NFTs, comment en tant qu'artiste Jessy allait utiliser cette technologie. Nous avions remarqué qu'il y avait peu de femmes dans les événements où nous nous rendions et lors des talks auxquels nous assistions. Notre constat : il fallait se faire une place, prendre la parole afin de ne pas reproduire ce qui avait pu se passer sur le marché de l'art traditionnel. Bien que l'on lie plus facilement l'univers Web3 et crypto aux « crypto bros » (bro = brother soit « frère »), il y a une volonté de contrebalancer des logiques d'entre-soi. Et c'est ce que Jessy et Annelise ont ensuite décidé de faire avec Gxrls Revolution, qui consiste à expliquer le Web3 à de nouvelles personnes, à créer un réseaux, monter des expositions, participer à des projets, des panels, des curations afin d'agir et ne pas constater dans quelques années d'une voix faussement ingénue : « Ah mais il n'y a que le travail d'hommes qui est montré dans le milieu NFT, il faut faire quelque chose pour rééquilibrer cela ». Non, selon nous, il faut y prendre part dès maintenant. 

8. Si tu pouvais dîner avec une figure de l'art (morte ou vivante), qui choisirais-tu et pourquoi ? 

Je pense que j'aurais beaucoup à apprendre du « flair » de Peggy Guggenheim. De son vivant elle était entourée des plus grands noms de l'art moderne, elle les a achetés, collectionnés, exposés dans sa propre galerie. Elle a sauvé des artistes pendant la Seconde Guerre Mondiale en les faisant venir aux États-Unis grâce à des faux papiers et en finançant leurs passages. Le musée Peggy Guggenheim à Venise a ouvert de son vivant. Je trouve ça assez fou cette vie d'art-ventures qu'elle a eue.



Sélection d'œuvres d'art

Édition, L'Arbre aux Serpents, Niki de Saint Phalle

L'Arbre aux Serpents

Niki de Saint Phalle

Édition - 75 x 50 cm Édition - 29.5 x 19.7 inch

Vendue

Sculpture, Petite Vénus bleue, Yves Klein

Petite Vénus bleue

Yves Klein

Sculpture - 6.2 x 2.4 x 0.1 cm Sculpture - 2.4 x 0.9 x 0 inch

8 000 €

Édition, In Deference, Shirin Neshat

In Deference

Shirin Neshat

Édition - 64.8 x 101.6 x 2.5 cm Édition - 25.5 x 40 x 1 inch

24 301 €

Peinture, Peace dove black, Shepard Fairey (Obey)

Peace dove black

Shepard Fairey (Obey)

Peinture - 61 x 46 x 1 cm Peinture - 24 x 18.1 x 0.4 inch

Vendue

Photographie, Faceless - Hidden Identities, Ebuka Michael

Faceless - Hidden Identities

Ebuka Michael

Photographie - 40 x 30 cm Photographie - 15.7 x 11.8 inch

700 €

Photographie, Jesus is My Homeboy, Sermon, David LaChapelle

Jesus is My Homeboy, Sermon

David LaChapelle

Photographie - 38.1 x 61 cm Photographie - 15 x 24 inch

43 742 €

Photographie, Rouge sur Blanc, Charlotte Abramow

Rouge sur Blanc

Charlotte Abramow

Photographie - 10 x 15 cm Photographie - 3.9 x 5.9 inch

600 €

Photographie, The Golden Age, Delphine Diallo

The Golden Age

Delphine Diallo

Photographie - 73 x 41 cm Photographie - 28.7 x 16.1 inch

6 100 €

Photographie, Double Sense, Anna Muller

Double Sense

Anna Muller

Photographie - 88 x 70 x 2 cm Photographie - 34.6 x 27.6 x 0.8 inch

2 120 €

Édition, You Loved Me Like a Distant Star, Tracey Emin

You Loved Me Like a Distant Star

Tracey Emin

Édition - 70 x 50 cm Édition - 27.6 x 19.7 inch

6 044 €

Édition, La parisienne, Louis Torres

La parisienne

Louis Torres

Édition - 30 x 30 x 0.1 cm Édition - 11.8 x 11.8 x 0 inch

55 €

Peinture, When two bodies lie, Nathanael Koffi

When two bodies lie

Nathanael Koffi

Peinture - 50 x 61 x 2 cm Peinture - 19.7 x 24 x 0.8 inch

2 500 €

Design, Untitled #414 (Clowns. 2003), Cindy Sherman

Untitled #414 (Clowns. 2003)

Cindy Sherman

Design - 80 x 60 x 1 cm Design - 31.5 x 23.6 x 0.4 inch

2 750 €

Photographie, Rembeka, Thandiwe Muriu

Rembeka

Thandiwe Muriu

Photographie - 90 x 60 x 0.1 cm Photographie - 35.4 x 23.6 x 0 inch

12 000 €

Sculpture, Orange bleue, Gaspard Mitz

Orange bleue

Gaspard Mitz

Sculpture - 24 x 34 x 6.5 cm Sculpture - 9.4 x 13.4 x 2.6 inch

Vendue

Peinture, J'ai des reserves d'indienne, Miss.Tic

J'ai des reserves d'indienne

Miss.Tic

Peinture - 33 x 41 x 2 cm Peinture - 13 x 16.1 x 0.8 inch

Vendue