L'ombre du temps
Paris 4 février 2016 au 27 février 2016
C’est Thierry Chavenon qui parle de ses tableaux, à demi-voix, avec douceur mais gravité. On entre dans son univers avec inquiétude comme la caméra d’Hitchcock pénètre dans une maison ou celle de Fritz Lang dans une ville : une maison ou une ville avec ses reliefs, ses intrigues, ses épaisseurs, sa force architecturale… à tâtons, on peut se cogner, à la recherche d’une lumière que l’on finit toujours par trouver. Chacune de ses toiles semble être le cadre d’une intrigue, d’un mystère à découvrir, d’un suspense qui aurait pour dénouement une sorte d’anonymat existentiel qui ouvre encore la porte vers d’autres ombres du temps. Le cinéma n’est pas loin.
Thierry Chavenon y a passé une vingtaine d’années à arpenter les plateaux, d’abord comme stagiaire sur Nikita de Luc Besson, puis sur Jusqu’au bout du monde du mélancolique Wim Wenders, jusqu’à devenir Chef décorateur du film De l’autre côté du périph de David Charhon et de En solitaire de Christophe Offenstein. Avec ces décors commence son travail pictural ; face aux projecteurs, il ruse pour faire plier la brutalité de la lumière, lui préférer l’ombre et la faire deviner plutôt que l’exposer.
Il explore en lui la passion de l’ambiance qu’il oppose encore aujourd’hui au narcissisme. Mais le cinéma c’est aussi un travail hiérarchisé, avec ses équipes, avec ses contraintes économiques et humaines qui canalisent les émotions. Plus encore dans la centaine de films publicitaires auxquels Thierry Chavenon a apporté son travail. Outre la démesure de la marchandise et de son prestige qu’il faut toujours éclairer plus, c’est aussi la puissance des directeurs de la photographie comme John Mathieson, Peter Suschitzky, ou Vilko Filac, ces autres démiurges de la lumière, qu’il rencontre là. Grands espaces sud africains ou américains, on est «extérieur plein ciel», mais aussi lumière noire de Berlin ou de Prague qui dans les années 1990 s’envolent vers les marchés, accueillent les tournages européens mais sans pour autant renier leurs filiations Mittel Europa.
D’avant, il aime parler de sa grand-mère qui baignait familialement dans les décors d’opéra, la musique classique et le dessin ; elle l’inscrit à l’École supérieure des arts modernes (ESAM) où il se forme à la rigueur architecturale et devient décorateur. A moins qu’il ne se rappelle que son père dessinateur-projeteur, dans un cabinet d’architecte à Orléans, traçait les plans d’un lotissement résidentiel tout droit sorti de l’imaginaire Bauhaus dans lequel Thierry passa toute son enfance. Les souvenirs sont parfois arbitraires, les filiations souvent convenues mais pourtant son parcours et aujourd’hui ses tableaux témoignent, presque brutalement, de ces repères.
Puis Thierry Chavenon a voulu en découdre, comme on dit des combats essentiels que l’on remet toujours à plus tard. Il s’est mis à peindre presque comme un fou, une centaine de toiles. Il dit que ses peintures sont des impulsions. Il fabrique une toile comme d’autres piquent une colère. Il travaille par pochade, sans esquisse comme d’autres font du trapèze sans filet, sans ressentir le besoin d’un croquis contraignant. Il peint des masses. Ses pinceaux doivent s’écraser sur la toile et laisser une large empreinte. Sans peur. Avec énergie. Son univers est marqué par une relation dialectique entre le noir et le blanc. Les couleurs se font entendre, mais en sourdine. On y perçoit les échos éloignés de l’Action painting ce courant new yorkais des années 1950 qui ne voulait pas dissocier la gestualité du travail des formes prises par la peinture de certains expressionnistes abstraits.
Aujourd’hui Jean-Philippe Therond, en sa galerie rue de Saintonge, nous présente ses peintures. Le dernier voyage d’une femme nue (Memento mori) nous installe dans L’ombre du temps.
- Jean-Pierre Hassoun, Directeur de recherche CNRS
-
4 rue de saintonge
75003, Paris
France
0608254597
Détails
Thierry Chavenon
France
Expositions à Paris
Galerie Art Jingle
Mathieu Piffeteau, nouvelle exposition
Du 18 mars 2024 au 22 avril 2024
Galerie Claire Corcia
Les servantes iraniennes et leur monde imaginaire
Du 25 février 2024 au 19 mars 2024
Galerie Art Jingle
Nebay 2024
Du 28 février 2024 au 28 mars 2024
Art Abstrait Safia WOSTH
Galerie Libre Est L'Art
Du 16 février 2024 au 26 février 2024
La Galerie d'art du Studio Idan
Au-delà des rêves par Brooke Shaden
Du 11 mars 2024 au 13 mai 2024
193 Gallery
La Mémoire du Monde
Du 3 janvier 2024 au 21 février 2024
193 Gallery
Entrelazos
Du 3 janvier 2024 au 23 février 2024
Galerie Claire Corcia
Timothy Archer - Des nouvelles d'Eéa
Du 3 janvier 2024 au 2 février 2024
Galerie Art Jingle
Michadu
Du 30 décembre 2023 au 27 février 2024
La Galerie d'art du Studio Idan
Iconic portraits
Du 8 janvier 2024 au 8 mars 2024