La période de transition est réputée pour être difficile. Elle est difficile à traverser, difficile à observer depuis la ligne de touche, et même difficile à expliquer pourquoi elle est si difficile (« les hormones qui font rage » n’est pas vraiment une explication). Il est tout aussi difficile de la représenter d’une manière qui ne soit pas ringarde ou trop sentimentale. Cet équilibre délicat exige à la fois un sens poétique de la retenue et un cœur sincère, pour que l’œuvre ne paraisse ni nostalgique ni mélodramatique.
Ainsi, cette exposition s’apparente à une sorte de marche sur une corde raide. « In our time, love letters were no longer send » s’inspire de motifs tirés de polaroïds pris à la fin de l’adolescence de l’artiste. Des expériences ludiques avec des amis, entièrement maquillée dans la baignoire, un oreiller timidement attrapé en guise de couverture – ces images tentent de donner un aperçu de moments où l’on pense avoir grandi, mais où en réalité, on apprend juste à exister.
Les agrandissements de ces minuscules photos positives dans les peintures de Suvi fonctionnent comme une forme de conscience de soi dans le souvenir – pourquoi photographier cette personne ? Pourquoi poser comme ça ? Qui suis-je ici ? Qui es-tu là ? Les peintures de Suvi soulèvent des questions sur les images capturées sur papier photographique dans des moments d’impulsion, des questions qui n’ont probablement jamais été envisagées au moment de la prise des photos mais qui révèlent la complexité du souvenir de la jeunesse. Les questions posées par les spectateurs des peintures de Suvi n’ont pas été posées par les modèles eux-mêmes. Personne ne se souvient plus des réponses. C’est le problème des vieilles lettres d’amour.
Quand elles étaient réelles, seul l’amour reste.
« À notre époque, les lettres d’amour n’étaient plus une chose. »
9.07-24.08.2024
Galerie Artrovert, Tallinn, Estonie
Commissaire : Aleksander Metsamärt
Photographie : Patrik Tamm
Lire plus