De gauche à droite dans le sens des aiguilles d'une montre : portrait des fondateurs d'Ishka Design, Inc. : Anishka Clarke (directrice du design) et Niya Bascom (directeur de la création) © Industry City. Images de leur projet « Whitehouse », Jamaïque, y compris des œuvres d'art personnalisées de Bruce Allen et Garfield Morgan © Niya Bascom 

L'entreprise de design d'intérieur Ishka Designs à Brooklyn a été fondée par Niya Bascom et Anishka Clarke. Si chacun de leurs projets reflète la personnalité de leurs clients, tous s'alignent sur les valeurs propres au studio. Le duo place la création d'environnements attentifs, minimaux, sur-mesure, artistiques et intemporels au cœur de son processus de création. Ainsi leurs projets sont le résultat de collaborations de long terme avec des partenaires et des artisans locaux. Aujourd'hui, Artsper vous invite à entrer dans la maison de Niya Bascom, directeur de la création d'Ishka Designs, pour découvrir comment l'art influence sa décoration intérieure.

1. Bonjour Niya ! Comment décrirais-tu ton style de décoration intérieure et les valeurs sur lequel il repose ? À quel type de client t'adresses-tu lorsque tu réfléchis à de nouvelles idées ?

Le style d'Ishka Designs (IDI) est minimal, sans effort et conscient. Il émane directement de notre philosophie, il est sur-mesure, réfléchi, minimaliste, artistique, intemporel et respectueux des matériaux naturels pour créer des écosystèmes de luxe. Nous faisons un travail continu, fondé sur l'héritage, pour explorer des modèles autour de la durabilité et de la longévité.

Nous nous adressons à tous ceux qui sont prêts à co-créer avec nous leur environnement (commercial, hôtelier ou résidentiel). Nos clients prennent des risques créatifs pour aboutir à un projet cohérent.

Œuvres d'art exposées dans la maison de Niya © Niya Bascom

2. Peux-tu nous raconter un projet passé qui résonne encore en toi en tant que designer ?

L'un de nos projets les plus marquants a été la conception d'une propriété en bord de mer à Whitehouse, en Jamaïque (Caraïbes). Nous avons rencontré et collaboré avec une multitude d'artisans exceptionnellement talentueux, qui utilisent principalement des techniques traditionnelles et des ressources limitées pour leurs créations. Les pièces qu'ils ont fabriquées pour nous restent encore nos préférées. Ce fut une belle expérience que de façonner nos projets aux côtés de ces artisans, en temps réel. Les connaissances que nous avons acquises lors de ce processus ont eu un impact permanent sur la façon dont nous  percevons notre travail et dont nous percevons le lien avec les communautés d'artisans qui entourent chaque projet.

Parmi les moments mémorables, je pense au vieillissement du bois dans l' océan, à la transformation d'un rocher en banc ou à notre menuisier fabriquant à la main chaque marche de l'escalier personnalisé de la villa. Ces événements, parmi d'autres, ont bouleversé nos idées en matière de design.

3. Ta philosophie fait la part belle à la simplicité et au minimalisme. Quel rôle les œuvres d'art jouent-elles dans la création des écosystèmes de luxe de Ishka Designs ?

L'art est la colonne vertébrale spirituelle de nos projets. Pour moi, l'art est ce qui vit à l'intérieur des artistes et est ensuite placé dans l'environnement du client, pour vivre avec lui. Mais l'art n'est pas seulement l'ajout d'objets physiques dans les espaces de nos clients. C'est aussi le processus de création, l'approche même de chaque nouveau projet, d'une pièce personnalisée, etc.

4. Ishka Designs est situé à Brooklyn. Quels sont tes endroits préférés pour apprécier de l'art dans cette ville ?

La galerie de Richard Beavers et Medium:Tings (propriété de Stephanie Baptist) sont deux endroits que j'affectionne particulièrement pour voir de l'art. Je pense aussi au MoCADA, le Bedford Stuyvesant Museum of African Art, Pioneer Works et le Brooklyn Museum. Sans oublier la ville de Brooklyn elle-même ! Du street art au street style, je suis entouré d'œuvres d'art, de toutes sortes, dans mes déplacements quotidiens. Et enfin, je dirai les jardins botaniques de Brooklyn (BBG), car certaines des meilleures œuvres d'art du monde viennent de la terre. Je trouve souvent l'inspiration dans les différents espaces du BBG : le jardin d'herbes aromatiques, le jardin japonais et la roseraie me donnent tous des idées que j'apporte ensuite à la clientèle d'IDI.

La photographie de l'artiste Delphine Diallo, Highness Samsara, est exposée dans la maison de Niya © Niya Bascom

5. Pourquoi as-tu commencé à collectionner des œuvres d'art ? Comment décrirais-tu les œuvres qui t'attirent et que tu as finalement ajoutées à ta collection ?

J'ai toujours aimé et acheté de l'art. J'apprécie les choses que je ne sais pas faire mais qui révèlent quelque chose en moi. Je décrirais ma collection comme étant culturelle, spirituelle, résonnante, substantielle... J'achète des œuvres d'art en fonction de ce qui me touche, m'émeut et m'inspire, et non en fonction de leur valeur monétaire. Cela dit, ma collection rassemble aussi bien des œuvres achetées à des artistes dans  la rue que des œuvres achetées dans de grandes galeries. Mes acquisitions sont souvent cosmopolites et centrées sur l'Afrique. C'est comme si ma collection d'art me révélait moi-même...

6. Quels sont les artistes et créateurs contemporains, célèbres ou émergents, qui t'ont intrigué ces derniers temps ?

Ayana V. Jackson est une artiste afro-américaine dont la puissante conviction inspire ses autoportraits. Elle utilise son corps et sa propre image pour déconstruire le regard colonisateur. En outre, ses choix de couleurs et de lumières sont exceptionnels.

Anthony Olubunmi Akinbola est un autre artiste qui m'inspire beaucoup. J'ai utilisé de nombreuses œuvres de cet artiste nigéro-américain dans les projets de mes clients. La manipulation des matériaux (durags) à la manière d'un pinceau lui a permis d'en faire une expérience culturelle.

Ensuite, Takeya Takata est un artiste japonais. Je suis globalement inspiré par les jeux d'échelles, de textures et de superpositions dans son travail. Il y a une compréhension quasi mathématique dans ses expressions qui m'attire.

Genesis Tremaine est une autre artiste afro-américaine dont j'apprécie le travail pour son utilisation de la couleur en lien avec ses croyances religieuses. Son travail fougueux m'entraîne dans un voyage visuel plein d'énergie intense.

Kimani Beckford est une artiste jamaïcaine. Son travail m'évoque une force et une puissance sans effort. Il y a dans son art une qualité viscérale et magnétique qui est à la fois surréaliste et curieuse. Je respecte profondément son inspiration artistique.

L'artiste sud-africain Zwelethu Machepha utilise, lui, une dynamique multidimensionnelle incroyable dans ses peintures et ses dessins. Son œuvre est comme un kaléidoscope intentionnel : un labyrinthe complexe de lignes chargées de souvenirs, qui forment des portraits sur l'infinitude africaine.

Et pour finir, Jack Whitten, un artiste afro-américain, dont l'art abstrait remarquable fonctionne comme son propre langage culturel. Il a fait preuve de clairvoyance en utilisant la matière, la texture et les couleurs pour illustrer son époque.

7. Enfin, tu as construit Ishka Designs en partenariat avec Anishka Clarke. Comment le fait de travailler en duo affecte-t-il votre style de décoration intérieure ?

Anishka est quelqu'un de confiance et d'extrêmement talentueux pour construire l'ensemble du travail d'IDI. La confiance entre nous est à la base de l'échange et de la remise en question des idées au sein de l'entreprise. C'est ce qui conduit finalement à une croissance personnelle et professionnelle. Au cours des quinze dernières années de travail en commun, nous avons appris qu'en restant fidèles au processus de notre vision, nous parviendrons toujours à quelque chose de beau et d'intemporel. Je pense également que le fait qu'Anishka et moi ayons mis nos egos hors jeu a permis à notre partenariat et à la dynamique d'équipe de notre entreprise de se dérouler sans effort.

Le projet d'Ishka Design « Whitehouse », en Jamaïque © Niya Bascom